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« Parlons d'Aut'chose », comme annonçait le press kit du premier album du groupe art rock québécois. Chacun de ses albums démontre sa propre identité, tous reliés par la voix anti-musicale, mais rythmique, du poète Lucien Francoeur qui récite plutôt que de chanter. Le premier album, « Prends une chance avec moé » (1974) présente le groupe comme duo de Francoeur et Pierre Gauthier « de la Vérendrye » (celui-ci à la guitare électrique et au synthétiseur). Les photos au verso de la pochette révèlent le reste des musiciens : Mick Gauthier (évidemment le frère à Pierre, à la basse), Jacques Racine (aux guitares) et Jacques Lalumière (à la batterie). Malgré la panoplie de styles musicaux qui permutent l'album, le tout se rejoint en thématique pop culture à l'allure glam, comme si Lou Reed s'était décidé de faire de la musique pour accompagner toute une gamme d'émissions de télé à l'époque. Du kitsch de la reprise pop du « Thème du Godfather » et le western humoresque de « La Vie Weston » au blues futuriste « Le Freak de Montréal », le groupe n'oublie pas d'inclure des pièces accessibles comme leur premier 45-tours « J't'aime pis j't'en veux », et la reprise « Hey You Woman ». Le groupe enregistre même une pièce anglais, « Rock and Roll Frog », destiné au côté A d'un 45-tours, accompagné du « Theme from the Godfather » au côté B. Le son du groupe devient plus sobre lors du deuxième album. Les membres y changent aussi : Jean-François St-Georges y arrive aux claviers, Lalumière ne reste que pour un 45-tours (« Sexe-fiction », repris sur cet album avec son remplaçant Chris Castle, et réenrégistré en anglais comme l'originale, « Good Vibrations », pour 45-tours), et Pierre quitte, lui aussi, avant même le nouvel album achevé (formant Eclipse sous peu). (On pourrait croire que la séparation fut difficile, en voyant l'image d'une fille de ruelle qui déchire le visage à Gauthier de la même affiche qui apparaît au premier album.) L'album « Une Nuit comme une autre » (1975) se concentre davantage sur le glam rock, les textes à Francoeur le démontrant toujours obsédé de vedettes du pop culture. Le groupe se concentre et suit davantage l'influence de Lou Reed. La première face du disque contient plusieurs chansons qui deviennent des hits à la radio, dont « Nancy Beaudoin » et « Blue jeans sur la plage » qui rejoignent « Sexe-fiction » (dont deux sont des reprises). C'est au deuxième côté que le groupe découvre son côté progressif, avec la transformation dramatique de la pièce « Comme à radio » de Brigitte Fontaine (maintenant complétée de plusieurs citations classiques et un corps musical signé de Pierre Gauthier) et la pièce de clôture morbide « Une Saison en enfer ». Aut'chose et le punk semblent une combinaison destinée. Mick Gauthier et Chris Castle sont remplacés par Guy Racine et Jean-Paul Harnois respectivement, et on lance l'album « Le Cauchemar américain » (1976) avec un cri de mort, « Les Pays d'en haut ». Le révisioniste pourrait prononcer l'album comme exercice de développement du nouveau style musical' du post-punk avant même que le punk atteint son sommet. C'est au tour de Jacques Racine de composer les musiques sur lesquelles Francoeur accouche sa poésie beat. Seul l'extrait « Le P'tit gros » brise l'atmosphère avec un refrain fait au rigodon. Ailleurs, c'est des changements brusques de tempo et un groupe qui ose aller encore plus loin. Et ainsi la discographie des années '70 du groupe se divise en deux parties distincts : la nostalgie marié au glam rock des deux albums issus du dictionnaire musical à Gauthier, et le regard anarchique au futur qui distingue le dernier. Pierre Gauthier et Lucien Francoeur reprennent leur collaboration musicale en 2000, portant fruit avec une nouvelle formation et un nouvel album. Bien qu'il en est autant multicolore que leur premier, c'est bien loin du monde progressif des années '70. On penserait que le groupe ait oublié l'énergie physique de « ...Cauchemar... » jusqu'à ce que Francoeur revienne (sans Gauthier, mais avec Racine) pour un spectacle révélatoire à Montréal en avril 2005. Accompagnés de musiciens jeunes et musclés (Voivod, Grimskunk, Groovy Aardvark) et une foule d'invités (du jeune punkster Caféine au traditionaliste Michel Faubert), Aut'chose se révèle comme influence omniprésente sur la scène musicale québécoïse d'aujourd'hui. Il en résulte également l'album « Chansons d'épouvante » avec la même équipe et les même pièces, cette fois-ci en studio. Les chansons sont autant féroces sur disque compact qu'en spectacle, mais cette fois-ci on s'aperçoit de l'absence des touches de finesse (!) autrefois présentes aux pièces de l'album « Le Cauchemar américain » grâce au claviériste St-Georges. Toutefois, avec toute cette énergie sur disque, il est difficile de se plaindre. Bien que leur côté prog n'est pas garanti lors du prochain album, on pourrait voir d'ici peu les meilleurs années de ce groupe. |
Québec's art rock group. Each of Aut'chose's albums boasts its own identity, all joined together by the tone-deaf, but rhythmical voice of poet Lucien Francoeur, who would rather recite than sing. Their debut, "Prends une chance avec moi" (1974) presents the group as a duo of Francoeur and Pierre Gauthier "de la Vérendrye" (on guitar and synthesizer). The back cover photos reveal the rest of the group: bassist Mick Gauthier (obviously Pierre's brother), guitarist Jacques Racine and drummer Jacques LaLumière. Despite the album's wildly diverse selection of musical styles, a thread remains undisturbed, a pop culture theme with a glam-rock sheen. One could think Lou Reed chose to record soundtracks for a variety of TV shows from that era. Amongst the kitschy pop reprise of "Le Thème du Godfather", the western-esque humor of "La Vie Weston" and the futuristic blues "Le Freak de Montréal", the group remembers to include a few accessible songs such as their first single, "J't'aime pis j't'en veux", and the cover song "Hey You Woman". The group also releases an English single, "Rock and Roll Frog" with "Theme from the Godfather" as the flip side. The band sobers up their sound for their sophomore release. Several members come and go: Jean-François St-Georges becomes the group's first keyboardist, Lalumière leaves after the first single ("Sexe-fiction", re-recorded for the album with new drummer Chris Castle, and also recorded in English with its original lyrics and title, "Good Vibrations", for subsequent single release), and Pierre also leaves halfway through the recording sessions (and soon forming his next group, Eclipse). (One could think the separation was a hard one, seeing an "alley girl" ripping Gauthier's face off the same poster that appears on the first album.) The album "Une Nuit comme une autre" (1975) concentrates further around glam rock, with Francoeur's poetry preserving his obsession with pop culture's stars. The first side of the album contains several future radio hits, with "Nancy Beaudoin", "Blue jeans sur la plage" bolstering the aforementioned "Sexe-fiction" (two of which being remakes). Flipping the album over, the group releases its progressive muse, beginning with the dramatic transformation of Brigitte Fontaine's "Comme à radio" (now complete with several classical quotes and most of its music written by Pierre Gauthier) and ending with the morbid "Une Saison en enfer". Hindsight lends creedence to the seemingly destined combination of Aut'chose and punk rock. Mick Gauthier and Chris Castle are replaced with Guy Racine and Jean-Paul Harnois, respectively, and "Le Cauchemar américain" leaps into action with a blood-curdling scream. In the revisionist's ear, the album seems an exercise in developing this new musical style... post-punk before punk even reached its zenith. Jacques Racine now writes the music upon which Francoeur lays down his beat poetry. The edgy atmosphere is only interrupted once, with the hoedown chorus within "Le P'tit gros". Elsewhere, tempos change suddenly and the group stretches its boundaries. And so the group's discography from the 1970's divides itself into two distinct parts: the first two albums sporting a glam rock fire, fuelled by Gauthier's nostalgic musical dictionary, and the anarchic look into the future that distinguishes the last album from the other two. Pierre Gauthier and Lucien Francoeur renew their collaborative ways in 2000, bringing forth a new album with a new lineup. While this one is as multicolored as their debut, it is far from the progressive sounds of the 1970's. One could believe this was no longer the same group whose "...Cauchemar..." nearly leapt off the turntable in a fit of physical energy... until the day Francoeur returns (this time with Racine at his side, instead of Gauthier) for a revelatory Montreal show in April 2005. With a who's who of Montreal's muscular alternative musicians forming the backup band (Voivod, Grimskunk, Groovy Aardvark) for Francoeur and several invited guests (from the young punkster Caféine to the ultra-traditional Michel Faubert), Aut'chose claims its place as an omnipresent influence on Québec's present music scene. "Chansons d'épouvante" sees the light of day soon after, with the same crew playing the setlist in the studio. While the recordings are just as ferocious as their live renderings, one now misses the finesse (!) of keyboardist St-Georges, especially on the songs taken from "Le Cauchemar américain". Still, with all this raw energy committed to disc, it's hard to complain. Although prog could have virtually disappeared with the release of their next album, we could soon see this group's best years. |